L’oïdium de la vigne, une maladie discrète et explosive

Vigne
Grappe oïdium baies éclatées

Baies éclatées suite à une pression oïdium

En 2019, l’oïdium a progressé dans de nombreux vignobles. Focus sur la biologie d’une maladie qui peut devenir explosive.

2 formes de conservation d’oïdium et 2 sources d’inoculum primaire

Erysiphe necator, champignon parasite spécifique de la vigne et agent responsable de l’oïdium se conserve sous deux formes hivernales :

  • le mycélium, à l’intérieur des bourgeons, responsable des attaques précoces sur les jeunes pousses (forme drapeaux)
  • les cléistothèces, structures issues de sa reproduction sexuée formées à la surface des organes malades en fin d’été et se conservant sur le sol, les écorces, les bois…

Au printemps, le cycle de développement de l’oïdium débute par des contaminations primaires issues de ces deux formes de conservation :

  • le mycélium dormant présent dans les bourgeons se réactive dès que la température devient plus clémente et contamine les jeunes pousses avec la formation de symptômes d’oïdium de type « drapeau » .  Courant dans le sud de la France, ce faciès est bien visible sur le cépage Carignan
  • au printemps les cléistothèces éclatent sous l’action de la pluie libérant des ascospores disséminées par le vent qui vont contaminer la vigne. Ces contaminations se déroulent au printemps à la faveur de conditions douces et humides et précèdent l’apparition des symptômes.

Les contaminations primaires ne sont généralement pas décelées.

Sensibilité des cépages à l’oïdium
Cépages sensibles Cépages peu sensibles
Aramon Cabernet Franc
Carignan Clairette
Cabernet Sauvignon Côt
Cinsault Grenache
Chardonnay Ugni Blanc
Chasselas Merlot
Chenin Muscadet
Gamay Noir Petit Verdot
Muscadelle Syrah
Négrette Sémillon
Pinot Noir  
Sylvaner  

Des premières contaminations à l’explosion de l’oïdium

Si l’oïdium reste une maladie très discrète dans un premier temps, les contaminations primaires vont engendrer, durant toute la saison, de nombreux cycles de contamination-infection qui vont se succéder si les conditions climatiques sont favorables à savoir :

  • des températures entre 6 ° C et 32 ° C avec un optimum autour de 26 °C
  • une hygrométrie avec un optimum de 85 % d’humidité relative, la germination des spores est possible jusqu’à 20 % mais est inhibée par l’eau liquide
  • une luminosité faible (le pathogène se développe sous la face inférieure des feuilles ou sous couvert végétal)
  • du vent qui peut favoriser la propagation de la maladie via la dissémination des conides mais qui favorise ou freine le développement de l’agent pathogène en modérant la température et en apportant de l’air humide ou en diminuant l’hygrométrie.

Les contaminations secondaires proviennent ainsi de 2 sources d’inoculum :

  • les conidies (issues du mycélium / reproduction asexuée de l’oïdium)  qui sont libérées et disséminées suite à un choc (vent, traitements, rognages, pluies violentes). Elles contaminent les feuilles et les grappes, germent et forment un nouveau mycélium à partir duquel se forment des conidiophores produisant de nouvelles conidies qui sont à l’origine d’un nouveau cycle.
  • les ascospores (issues des cléistothèces / reproduction sexuée de l’oïdium) qui sont libérées au printemps lorsque les conditions sont favorables.
Cycle Oïdium de la vigne

 


Le stade maximal de sensibilité de la vigne se situe entre la floraison et la nouaison.

 

« L’oïdium est une maladie sournoise » souligne Jean-Baptiste Drouillard, expert technique vigne chez Syngenta, « invisible dans ses premières phases, elle peut se développer rapidement et exploser à la faveur de conditions favorables ». Une biologie qui incite les vignerons à la plus grande vigilance vis à vis d’une maladie de moins en moins secondaire dans la plupart des vignobles.


Actualité
Une campagne 2019 marquée par le retour de l’oïdium

A la différence du millésime 2018 très marquée par les attaques de mildiou, 2019 était une année avec une pression de maladies beaucoup plus modérée sauf pour l’oïdium qui a fait une progression dans certains vignobles en particulier en Bourgogne où cette maladie devient une préoccupation majeure. D’autres vignobles ont également été touchés par l’oïdium comme la Champagne avec une installation très précoce de la maladie sur les inflorescences et les feuilles. En Val de Loire également, de nombreuses parcelles ont été touchées. Dans les vignobles du sud-est traditionnellement impactés par l’oïdium, la saison 2019 a été marquée par des contaminations précoces puis une montée en puissance de la maladie jusque fin juin où l’oïdium a été stoppé par la canicule.


Recherche
Deux génotypes d’E. Necator

Apparue dans les vignobles français en 1847, l’oïdium continue de se dévoiler. Au début des années 1990, deux génotypes différents d’Erysiphe necator, agent responsable de l’oïdium, ont été identifiés en Europe :

  • le groupe A : souvent associé aux pousses en drapeaux, retrouvé précocement lors des épidémies, il survit durant la période hivernale dans les bourgeons d’hiver
  • le groupe B : associé aux infections par ascospore mais aussi aux pousses en drapeaux, il se retrouve tardivement lors des épidémies. Il survit lors de la période hivernale dans les cléistothèces ou dans les bourgeons d’hiver.

En début de saison, on retrouve majoritairement le groupe A et en fin de saison le groupe B