Alerte au mildiou précoce dans les régions viticoles
Douceur de l’hiver et humidité font craindre un démarrage précoce du mildiou avec des œufs déjà mûrs dans la plupart des vignobles.
Des conditions climatiques très favorables à la maturité des œufs
Le mildiou a frappé fort en 2023 dans certaines régions viticoles et le démarrage de la campagne ne semble pas laisser de répit aux vignerons car les conditions climatiques sont très favorables depuis l’automne (pluie et température).
« Les vignobles de la façade atlantique ont été très arrosés cet hiver avec 750 à 900 mm de pluie en 5 mois et seulement 2 jours de gel. Les conditions météo de la sortie d’hiver ont favorisé une maturité très précoce des œufs d’hiver qui peuvent être la source de contaminations primaires » observe Gilles Robert, Ingénieur Solutions Agroécologie dans le Sud-Ouest. « Précisément, à fin mars, sur le réseau de suivi Syngenta réparti sur les 3 départements viticoles (Gers, Gironde et Charentes), 60 % des sites étaient mûrs en 24 à 48 heures (sorties de macroconidies en conditions labo). C’est du jamais vu depuis que nous avons mis en place cet observatoire en 2013 » ajoute-t-il.
Dans les autres vignobles également, l’heure est à la vigilance :
- « la vigne a 6 jours d’avance, la dynamique de pousse est rapide avec des températures douces et les œufs sont mûrs » remarque Ludovic Bonnard, Ingénieur Solutions Agroécologie en Champagne.
- « la végétation est en avance à cause de l’humidité des derniers mois. Les premières indications montrent que les œufs sont murs. En Côte, d’Or, la société Apex conseil viticole indiquait dans un communiqué qu’un de ses sites avait basculé au 21 mars avec des œufs mûrs, une situation inédite » signale Pascal Grosbon, Ingénieur Solutions Agroécologie dans la région Est.
- « la situation est inédite dans les vignobles de PACA mais aussi d’une partie du Languedoc Roussillon avec un cumul de pluie (250 mm sur le seul mois de mars à Nîmes par exemple) associé à des températures douces (+ 1,6 ° C par rapport à la moyenne) qui a favorisé la maturation des oospores de mildiou » explique Jean Litoux, Ingénieur Solutions Agroécologie dans le Sud-Est.
- « dans les vignobles du Val de Loire, la vigne devrait être au stade sensible avec une dizaine de jours d’avance vers mi-avril et on s’attend, compte tenu des conditions météo, à un démarrage précoce du mildiou », remarque Marie-Noëlle Tanné, Ingénieur Solutions Agroécologie dans cette région
Quelles sont les conditions optimales entraînant la contamination primaire ?
Les conditions nécessaires pour une contamination primaire sont des œufs d’hiver à maturité, une vigne réceptive (2 à 3 feuilles étalées), des pluies très humectantes (3 à 5 mm suffisent) avec des températures supérieures à 11°C. Les œufs germent alors dans l’eau et à la faveur de températures optimales, ils libèrent des zoospores qui provoquent les contaminations primaires appelées aussi élites. La période d’incubation peut durer 10 à 14 jours en fonction des conditions de température et d’humidité. Sur ce début avril 2024, nous vivons ce phénomène avec des conditions climatiques optimales.
Protéger les cépages sensibles et précoces dès 2 à 3 feuilles
Cette situation inédite par sa précocité et les conditions favorables au mildiou invitent les vignerons à protéger les cépages précoces et sensibles. « Il faut être particulièrement vigilant sur les cépages comme le Merlot, le Manseng, le Colombard et le Chardonnay en assurant une protection fongicide dès 2 à 3 feuilles » observe Gilles Robert. Dans le sud-est, où le développement des vignes affiche 2 à 3 semaines d’avance, les vignerons sont également en alerte : « vu les températures estivales annoncées, une sortie de tâches est possible dès la 2ème semaine d’avril avec un risque de risque de pluie ou de forte humectation pouvant entraîner un repiquage » remarque Jean Litoux. « Pour éviter cette situation, dans les secteurs ayant reçu des précipitations significatives et sur les cépages les plus concernés, en particulier le Chardonnay (sensible et rémunérateur pour les vignerons), une 1ère protection fongicide est recommandée dès la présence de feuilles voire pointe verte pour les zones inondées » ajoute-t-il.
Pour cette 1ère protection contre le mildiou, les vignerons peuvent s’appuyer, en préventif, sur des solutions cupriques (CUPROCOL® Duo) associées à du REDELI® pour gagner en persistance et systémie. « La suite de la protection mildiou dépendra évidemment de la météo des prochaines semaines », rappelle Gilles Robert, « il est essentiel de ne pas se laisser déborder et donc de s’organiser en conséquence pour préserver la récolte 2024 ».
OAD : RaisoMildiou pour intervenir avant la sortie des tâches
RaisoMildiou est un service proposé par Syngenta depuis les années 2000, qui permet la détection du mildiou, par analyse au laboratoire, avant l’apparition des symptômes au champ. Cela permet de déclencher les 1ers traitements en préventif des contaminations secondaires.
Ce système repose sur la méthode du sarment rabattu (collecte des feuilles mildiousées, dès la vendange, réserve et rabat d’un sarment au sol en fin d’hiver, positionnement des feuilles mildiousées sous le sarment au printemps, prélèvement et analyse des feuilles dès la première pluie contaminatrice).
« RaisoMildiou est un outil précieux car il permet d’intervenir et de protéger la vigne pendant la période d’incubation du mildiou, silencieuse et discrète, avant la sortie des tâches », observe Pascal Grosbon.
En 2024, ce sont ainsi 19 sites qui étaient suivis sur la façade atlantique et 16 dans les vignobles septentrionaux.